SAISON 2 : LA SANTÉ EN SÉRIES

6e Série : H

(Création Abd-el-Kader Aoun, Xavier Matthieu et Éric Judor)

Le fabuleux destin de Jamel Debbouze

Ce matin du 17 janvier 1990, sur le quai de la gare de Trappes, le jeune Jamel a été heurté violemment par le train Paris-Nantes. À présent, il est sur son lit d’hôpital, assommé de calmants. Il ne sait pas encore combien cet accident va profondément bouleverser son destin. Bientôt, il va se réveiller, avec une foule de questions en plus sur le sens de sa jeune vie … et avec un bras en moins ! Voilà plusieurs jours que le jeune garçon est à l’hôpital. Il ne sent plus les doigts de sa main droite. Il ne peut pas les bouger non plus. Mais il met ça sur le compte du volumineux plâtre qui enserre aussi son thorax. Il n’a pas mal dans sa chair. Il a mal dans son âme. Hier, le chirurgien a parlé à ses parents. Il leur a annoncé que le bras de Jamel était « mort ». C’est le mot qu’il a employé, car il ne savait pas comment leur dire autrement. Il a expliqué que c’était un moindre mal, car leur enfant, lui, par miracle, était vivant !

Pendant des jours, Jamel a insulté son bras, puis, petit à petit, il a réalisé qu’il était fier de ce membre qui ne lui répond pas. Alors, il a décidé que ce bras ne serait plus jamais une gêne, encore moins une honte. Après plusieurs tentatives pour le maintenir en place avec une écharpe, il l’a finalement maîtrisé en bloquant sa main dans sa poche. Enfin, il s’est mis à danser devant la glace et il a eu l’impression de ressembler à une marionnette dont le fil du bras droit aurait cassé. Il a beaucoup ri. Ses cinq frères et sœurs aussi !

L’adolescent s’est vite habitué à son infirmité. Elle lui confère une allure singulière. Il a ce quelque chose en moins qui lui offre un quelque chose en plus.

Et ce n’est pas par hasard si le théâtre lui permet de se faire remarquer. Il improvise sa vie ; de la Compagnie Théâtrale de la Cité des Merisiers à la bien nommée Ligue d’Improvisation Française, du one-man-show à la série télévisée, du cinéma à l’animation d’émissions radio et télé, il promène son humour, son accent, ses bredouilleries, ses approximations et ses expressions inimitables. Le petit beur de Trappes nous console de notre Coluche, dont il partage l’humour, la vie à cent à l’heure, la bonne bouille et une vraie compassion pour les causes humanistes.

En ce mois de juin 2000, à la veille de ses vingt-cinq ans, la tête lui tourne un peu. Tout va trop vite. Sa famille lui manque, surtout la présence et l’amour de sa maman. Hier, il a appris la mort de Frédéric Dard, à l’âge de 79 ans. Comme beaucoup, il ne savait pas que l’auteur des San-Antonio, l’écrivain aux deux cent cinquante millions de livres vendus, avait un bras paralysé depuis son enfance !

 

H, une série médicale ?  « Dites-moi pas qu’c’est pas vrai ! »

Deux événements « bleus-blancs-beurs » considérables ont marqué l’année 1998 : notre victoire à la coupe du monde de football et la naissance de la série médicale H lançant les carrières de trois doux dingues que rien n’arrête si le rire doit être au bout du gag : Jamel Debbouzze et le duo inséparable Éric Judor et Ramzi Bédia. La banlieue parisienne, l’Algérie, la Guadeloupe et la France profonde associées dans la même rigolade!

 

Mais présentons d’emblée nos excuses à nos lecteurs pour un abus de langage : H n’est pas une série médicale, mais seulement une série télévisée ayant pour décor principal un service de chirurgie orthopédique, pour acteurs des frapadingues qui portent des blouses bleues et pour patients des visiteurs anonymes, ou non, gisant dans des lits médicalisés.

Là s’arrête une improbable comparaison avec Urgences. Pour notre plus grand plaisir, en réalité ! Celui de suivre les délires d’une équipe de guignols, durant soixante et onze épisodes répartis en quatre saisons de la série la plus déjantée du PAF. On ne saura jamais – et cela ne nous ne regarde pas, ajouteraient Les Inconnus – sous quelles influences psychédéliques sont nés les scénarios excentriques – et péri-urbains, dirait Jamel jamais à court d’une approximation – largement remaniés en direct-live par le trio infernal. Direct et spontané, car il faut savoir que les deux premières saisons se sont jouées devant un public présent dans le studio, acteur invisible dont les rires ne sont pas préenregistrés.

Au début, on se dit qu’un peu de féminité va apporter douceur et lucidité dans ce monde de fêlés ; Clara l’infirmière et Béa la doctoresse nous détrompent rapidement.

La première est perverse, peut-être parce que son père, qui voulait une fille, l’a toujours appelé Jacques, la seconde est bonne fille, mais d’une naïveté crasse, sans doute parce qu’elle adorait, enfant, disséquer les animaux et leur arracher le cœur, même si on ne voit pas bien le rapport !

Il fallait aussi un débile en chef ; ce rôle est tenu à merveille par le Professeur Maximilien Strauss. Tenant plus du tueur en série que du chirurgien orthopédique, il jetterait l’opprobre sur la profession, s’il ne confessait pas, un jour, avoir usurpé l’identité du vrai Strauss. Après, bien sûr, l’avoir assassiné à coup de fer à repasser et lui avoir volé son fric pour financer un trafic d’enfants tamouls. Nous voilà rassuré !

En fait, si H n’a pas volé sa place parmi les séries médicales, c’est parce que le rire est souvent la meilleure des médecines. Et qu’on en a bien besoin dans notre monde souvent plus dingue que la plus folle des séries télévisées.

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